5 juin 2021

Le Télégramme : Les agents secrets « sont en général des prêtres, des prélats… »

Il est l’auteur du livre « Les espions du Vatican ». Rencontre avec Yvonnick Denoël qui plonge dans les coulisses du plus petit État du monde.

Qui sont les espions du Vatican ?

Le Vatican n’a pas de service de renseignement structuré, il a des réseaux évolutifs et mobiles qui varient selon chaque pape et qui dépendent de lui. Ces espions sont en général des prêtres, des prélats, des assistants des sous-secrétaires d’État. Le Vatican a aussi été très espionné. En 1978, par exemple, onze micros posés sous plusieurs périodes par les Soviétiques et les Américains entre autres, ont été découverts. Il y a eu aussi un service de contre-espionnage au XXe siècle quels que soient les papes. Des personnes très discrètes, qui n’apparaissent pas dans le haut de la hiérarchie, qui ne sont pas fichées par les services adverses et peuvent circuler tranquillement. Elles sont chargées de missions spéciales délicates.

Les services sont-ils très actifs sous tous les papes ?

Jean Paul II a été le pape le plus versé dans le renseignement. Il a été éduqué sans le vouloir par les services polonais et il a eu une vraie formation de chef de réseau, pour avoir dû apprendre la clandestinité en franchissant les marches de l’église polonaise. Il s’est appuyé sur des prêtres, des évêques pour constituer un réseau de renseignement parallèle qui a soutenu notamment Solidarnosc et qui ne rendait de comptes à personne sauf à lui. Jean Paul II recevait aussi personnellement le patron de la CIA. Je ne crois pas que le pape François veuille déployer un nouveau type de renseignement adapté aux enjeux actuels. Il veut plutôt surveiller étroitement l’épiscopat pour savoir où sont les cadavres dans les placards et qui est susceptible de poser des problèmes. François veut maîtriser la curie qui était en roue libre depuis la fin du pontificat de Jean Paul II. Mais il se pourrait que des réseaux aient été montés et nous ne le savons pas.

Vous abordez aussi l’affaire de meurtre des gardes suisses en 1998. Quelle est votre perception de ce dossier ?

Cette affaire n’est pas un échec des renseignements, c’est une opération de contrôle des dégâts. Pour tout ce que j’ai pu regarder, c’est une affaire de mœurs. Les invraisemblances ont été accumulées et, comme pour la mort de jean Paul I, on a voulu cacher des choses peu reluisantes mais qui ne relèvent pas du complot et on rend du coup tout le monde suspicieux.

« Les espions du Vatican », édition Nouveau Monde, 25.90 €